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« CHACUN CHERCHE SON CHOIX »

Delanoë, un nouveau venu de poids dans le melting-pot Macron

Ce mercredi matin 8 novembre, l’ancien maire PS de Paris a annoncé son soutien à Emmanuel Macron, plutôt qu’au « dangereux » Hamon. Les primaires, censées mettre de l’ordre dans la course aux présidentielles, ont littéralement fait imploser le paysage politique. Des débris de « la gauche » comme de « la droite » cherchent l’endroit le plus avantageux pour se positionner. L’un des creusets les plus favorables à ces atterrissages en catastrophe, c'est le melting-pot Macron. Claire Manor

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Même si on lui reproche un programme inconsistant, l’étiquette du « libéralisme façon troïka européenne » est suffisante pour attirer les fans de l’économie libérale et de l’Entreprise triomphante. On a d’ailleurs déjà goûté à la confiture avec la loi Macron. Si cette recette n’a pas été du goût des travailleurs, elle semble pourtant plaire au « socialiste libéral » Delanoë.

Un argument facile : faire barrage à Marine Le Pen

Delanoë, annonçant son ralliement à Macron, balaye toute accusation potentielle de trahison en expliquant que son choix est « pour la bonne cause  ». S’il choisit Macron, c’est qu’il veut barrer la route à Marine Le Pen. Même argument que le communiste Patrick Braouezec qui vient de faire la même démarche. Cette référence au « vote utile » que l’on va entendre résonner de tous côtés au second tour, Delanoë n’hésite pas à l’avancer dès le premier tour. « Il faut tous que nous nous posions la question du vote du premier tour pour éviter la catastrophe du second », explique-t-il. Bien sûr, les derniers sondages qui montrent un Macron talonnant Marine Le Pen à 0,5 % d’écart, tandis que Hamon est à la peine avec seulement 14% des intentions de vote, lui en donnent le prétexte.

Mais c’est un peu court pour assurer la parade et les réactions n’ont pas tardé dans le camp Hamon. Aurélie Filipetti, sa porte-parole, a réagi violemment. Elle a qualifié la décision de Delanoë de "trahison" et s’est indignée en trouvant d’une « grande hypocrisie » l’utilisation de l’argument du Front national et du péril fasciste pour renier le « vote massif des électeurs de la primaire à gauche en faveur de Benoît Hamon ». Elle a rappelé que 60% d’électeurs à Paris ont voté pour le candidat PS et que Bertrand Delanoë a été le maire de la capitale entre 2001 et 2014. Quant à Macron, elle rappelle qu’il n’a jamais été élu.
Quant à Anne Hidalgo, elle a marqué à plusieurs reprises sa divergence avec Macron. « Ce n’est pas un candidat de gauche dit-elle de lui, en l’accusant d’avoir «  un programme très proche de celui de François Fillon sur beaucoup d’aspects ». Ce qui lui vaut le qualificatif de « femme libre » de la part de son prédécesseur à la tête de la Mairie de Paris qui n’a pas fait le même choix qu’elle.


Plus qu’un choix par défaut, une orientation de longue date

Après avoir mis en avant l’argument FN, Delanoë change de braquet et explique qu’il ne peut pas soutenir Hamon parce qu’il est « dangereux ». « Il ne rassemble pas et n’est pas en mesure de produire du vrai progrès social », dénonce-t-il. Pour ce qui concerne l’absence de rassemblement, c’est autant une pierre dans le jardin du frondeur entré en dissidence au sein du PS, que dans celui du candidat qui a échoué à rallier sur sa gauche un Mélenchon.

Quant à l’incapacité à produire du « vrai progrès social », elle fait implicitement mais clairement allusion à la mesure phare d’Hamon, le « revenu universel ». Delanoë lui adresse probablement les mêmes critiques que Macron : c’est une proposition qui revient à admettre « qu’il faut s’installer dans le financement durable d’un chômage de longue durée » alors que « le travail est un levier d’émancipation pour les individus  ».

Ce n’est donc pas seulement contre Marine Le Pen ou par défiance vis-à-vis de Benoît Hamon que l’ancien maire PS de Paris se rallie à la candidature de l’ex-ministre de l’économie, mais parce que profondément, il partage sa vision libérale. Dès 2008, il se revendiquait comme un « libéral » dans son livre d’entretien avec Laurent Joffrin, directeur de la rédaction de Libération. « Nous devons être des managers. Des managers du changement, de la réforme du dialogue social, des managers de l’espoir. Mais des managers », expliquait-il alors à propos du Parti socialiste. Une qualité qu’il retrouve chez Macron et qui nourrit une proximité qui n’est pas nouvelle. Elle est maintenant clairement officialisée Delanoë sur France Inter quand il déclare : « le candidat qui se rapproche le plus de mes convictions de socialiste, réformiste, européen, réaliste, c’est Emmanuel Macron ».

Delanoë montre le chemin aux oiseaux migrateurs

Delanoë ne prend pas seul son envol vers le cap Macron. Il rejoint le contingent d’une grosse vingtaine de personnalités PS qui avaient déjà apporté leur soutien à Macron, parmi lesquelles on trouve par exemple Gérard Collomb (maire de Lyon), Florent Boudié (député de la Gironde) ou Christophe Caresche (député de Paris).

Derrière l’ancien maire de Paris, de manière encore discrète, nombreux sont ceux, parmi les ministres notamment, qui s’apprêtent à migrer. L’argument du barrage au FN n’est d’ailleurs pas pour rien dans ces choix. La rumeur du ralliement du ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian est plus que jamais dans l’air et le ministre de l’Economie Michel Sapin, ancien collègue de Macron à Bercy qui l’a souvent taclé, vole aujourd’hui à son secours.

Car l’épée de Damoclès des scandales cachés tombe aujourd’hui sur Macron. Si Delanoë a déjà fait la traversée et rejoint l’équipe Macron, il n’est pas dit que les autres n’interrompent pas leur démarche. Qu’adviendra-t-il si les révélations du Canard Enchaîné le jour même du ralliement de Delanoë prennent corps. Ne verra-t-on pas l’ascenseur descendant de Macron croiser l’ascenseur remontant d’un Fillon qui après avoir touché le fond reprendrait un peu d’altitude ? Quelles peuvent être les conséquences d’une accusation de délit de favoritisme concernant l’organisation d’une soirée à Las Vegas si le Parquet National Financier décidait, après plus amples informations de donner des suites à l’affaire ?…

Dans un milieu politique qui craque de toutes parts, les paris deviennent de plus en plus risqués. Beaucoup commencent à penser que plus tard ils s’engageront, mieux ce sera pour eux…

crédits photo : AFP


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