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Qui a peur de Philippe Poutou ?

Dans les coulisses du non-débat de ce soir

Officiellement, ce soir se tient le dernier débat entre les 11 candidats à la présidentielle. En réalité, il semblerait que tout ait été fait pour éviter que ne se répète le « Grand débat » du 4 avril et des confrontations à trois jours d’un premier tour aux contours incertains.

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La dernière émission politique de la campagne présidentielle va finalement se tenir ce soir à 20h sur France 2. Pourtant, jusqu’au dernier moment son organisation aura été troublée : difficulté à déterminer le format de l’émission, une présence de l’ensemble des candidats non assurée et la tenue même du débat discutée. Cet ultime débat s’est révélé être l’objet d’une véritable bataille pour les candidats - les "gros" candidats - pour parvenir à formater, encadrer, au maximum ce "débat" afin que rien - et explicitement le discours et le franc parler d’autres candidats comme Philippe Poutou - ne vienne perturber ces dernières prises de parole, au risque de les mettre en difficulté.

Tout faire pour éviter le scénario du « Grand débat » du 4 avril

L’idée d’un débat quelques jours avant le premier tour était loin d’enchanter la plupart des candidats, surtout les « grands ». Fillon, Le Pen et Mélenchon ayant notamment exprimé leur réserve jusqu’au 18 avril sur leur participation au débat. Après avoir hésité sur la date, la pertinence d’une telle échéance, menaçant ainsi l’existence de ce second débat, l’ensemble des candidats ont fini par s’arrêter sur cette date du jeudi 20 avril, à plusieurs conditions. Il semble qu’en coulisses un ensemble de discussions et d’opérations de tractages aient porté sur le format de l’émission : empêcher que ne s’organise un débat à l’image de celui du 4 avril où les candidats avaient la possibilité de s’interpeller les uns, les autres, de se répondre, et où les « petits » candidats qui avaient une place se sont engouffrés dans la brèche. Un peu trop à leur goût.

De nouvelles règles du jeu

Ainsi, pour le deuxième débat, les règles ont changé. Comment en trafiquant un peu les règles parvient-on à en faire un non-débat ? C’est simple, les candidats se succéderont pour 15 minutes d’entretien individuel en direct devant deux journalistes de la chaîne. Cette nouvelle règle des "15 minutes" a été défendue en coulisses par les "gros candidats" en s’appuyant sur le soutien de la chaîne France 2 qui est à leur botte et tient aussi à ce qui rien ne déborde au prétexte qu’à quatre jours du premier tour les "citoyens" auraient besoin de finalement "d’éclaircissements" et non de "spectacle".. Michael Field, directeur de l’information de France Télévisions, a d’ailleurs défendu publiquement le choix de ce non-débat en ces termes : «  le débat, c’est formidable, c’est les punchlines, les petites phrases, les postures, mais trois jours avant le scrutin, ce n’est pas de ça dont les citoyens ont besoin. On ne va pas aller vers la politique-spectacle mais une forme sérieuse, cadrée, statutaire  ». Les candidats disposeront ensuite de 2 minutes trente pour un éventuel droit de réponse et pour conclure. Enfin, l’ordre de passage a été décidé par tirage au sort le 18 avril à 9h et la disposition des pupitres a été savamment pensée. Le sens des nouvelles cartes à jouer est clair : cadrer au maximum, éviter tout débordement, éviter que certains candidats comme Philippe Poutou ne vienne troubler leurs dernières prestations en le plaçant sous haute surveillance.

De quoi ont-ils peur ?

Un second « débat » sur France 2, à heure de grande écoute, dont on devine aisément les raisons pour lesquelles les candidats sont particulièrement attentifs pour certains aux conditions dans lesquels il se tient, et réticents pour d’autres à l’idée même qu’il ait lieu. En effet, dans ces présidentielles agitées, instables, les principaux candidats en lice – Macron, Mélenchon, Le Pen, Fillon – veulent éviter à tout prix d’avoir à répondre à une attaque à quelques jours du premier tour avec un important niveau d’incertitude et encore beaucoup d’abstention. Et ils ont bien raison de craindre un tel débat où certains pourraient avoir à se défendre des nombreuses casseroles qu’ils trainent ou encore à s’expliquer sur le contenu réel de leur programme. Une situation qui effraie beaucoup moins les « petits » candidats. Au « Grand débat » le 4 avril, les interventions des candidats trotskistes Philippe Poutou et Nathalie Arthaud avaient fait mouche, le candidat du NPA n’ayant pas hésité à mettre sur la table les affaires dans lesquelles sont empêtrées Fillon et Le Pen et à défendre ouvertement un programme contre les politiques austéritaires, libérales et racistes des deux candidats. Des interventions du candidat anticapitaliste et révolutionnaire qui ont été très saluées les jours et semaines à suivre, et ont fait perdre la face à ces politiciens qui peinent à tenir debout. Au travers de ce non débat, c’est encore une fois le caractère anti-démocratique de la classe politique et médiatique qui sont à dénoncer. Un système que certains comptent bien faire perdurer autant que possible…

Crédits photo : AFP/ JOEL SAGET, Eric FEFERBERG


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