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Quand la « bavure » n’en est pas une

Confessions d’un flic "voyou"

Renan Granger{} En mars 2015, six policiers de la Brigade Anti Criminalité (BAC) de Stains sont arrêtés pour « association de malfaiteurs en vue de la préparation du délit de trafic de stupéfiants », « vol en réunion » et « violences volontaires ». Une « bavure » ? Un acte isolé ? Commis par des « ripoux » ? Le témoignage du chef de la bande, Benoît O., permet d’en douter et de mettre en évidence les fonctionnements de l’institution policière.{{}}

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« Gardien de la paix » ou cowboy urbain ?

Son témoignage permet tout d’abord de faire ressortir un élément qui revient régulièrement dans les discours des policiers, et particulièrement chez ceux de la BAC. Ceux-ci se décrivent souvent à la recherche d’action, de suspense. L’intéressé le dit lui-même : « je n’aurais pas pu me mettre derrière un feu rouge à dresser cent PV par jour » ou encore « ne pas rentrer dans une cité par peur ». Ainsi, derrière l’image que cherche à se donner la Police Nationale, celle de « gardiens de la paix » au service de la population, le discours des policiers montre une réalité bien différente. On y voit des agents mus par l’envie d’en découdre, de faire leurs preuves, de montrer de quoi ils sont capables, grisés par l’impunité dont ils disposent, et ce particulièrement dans les quartiers populaires. Et avec les conséquences que l’on sait pour les habitants qui résident sur leur terrain de chasse : harcèlement, violences policières, qui vont régulièrement jusqu’au meurtre, toujours couverts par la justice. Chaque année, des dizaines de personnes meurent ainsi sous les coups de la police, en silence et dans l’impunité.{{}}

Derrière la parodie de « justice », la politique du chiffre

Dans son témoignage, Benoît O. n’y va pas par quatre chemins : « En matière de stupéfiants, entre 70 et 80 % des procès-verbaux en France sont faux et tout le monde le sait dans la police ! ». Mais cela n’empêche pas de fêter les arrestations de « dealers » à coup de champagne le soir au commissariat. D’ailleurs, l’intéressé en a la conviction : il a arrêté de « vrais bandits » et « si c’était à refaire, [il] referai[t] la même chose ». On voit ici tous les mécanismes de pensée d’une police raciste et empreinte de mépris de classe qui, même en sachant consciemment avoir bricolé les preuves de l’arrestation, se persuade de la culpabilité de ses victimes. D’ailleurs, pourquoi en douter, alors que ces méthodes ont permis à l’intéressé de devenir « l’un des dix meilleurs de Seine-Saint-Denis, à entendre [sa] hiérarchie » et d’être décoré de la médaille du courage de bronze et d’argent ? Pour lui, son arrestation n’est d’ailleurs pas tant liée à ses méthodes, mais au fait qu’il ait commencé à concurrencer les policiers de la Police Judiciaire (PJ) en ramenant des affaires « de folie ».

Dès lors, comment peut-on s’étonner que certains essayent d’aller plus loin, et comme dans le cas de Benoit O., de passer aux fichiers des immatriculations la voiture que son voisin voulait acheter, voire de carrément commencer à vendre soi-même de la drogue ? Si l’intéressé nie l’accusation de « trafic de stupéfiants », le nombre d’affaires révélées au grand jour de policiers « ripoux », depuis le début de l’année l’illustre : on dénombrait déjà 15 arrestations au mois de mars dernier depuis le début de l’année. {{}}

Tous « ripoux » : les hommes de main d’une société de classe

Davantage que des dysfonctionnements de l’institution policière, le témoignage de ce « ripou » illustre la seule fonction que peut remplir la police dans une société où règne une injustice profonde, une société gangrénée par une petite minorité de patrons, appuyés par un gouvernement, qui spolie, à travers l’exploitation, les richesses du plus grand nombre. Et celle-ci l’illustre chaque jour un peu plus : en opprimant les classes populaires des banlieues frappées par la misère, et en réprimant régulièrement les mouvements sociaux. En guise d’exemple, difficile de ne pas voir la complicité éclatante entre ce groupe d’homme en armes et les patrons voyous lors de la dernière révolte légitime des salariés d’Air France.
C’est pourquoi, face aux abus et aux violences de la police, il n’y aura « ni oubli, ni pardon » de notre côté, mais une lutte incessante pour la désarmer !


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