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Coupe du monde

Brassard LGBT. Toutes les équipes se couchent face à la FIFA pour ne pas vexer le Qatar

Ce lundi, les équipes européennes qui s'étaient engagées timidement à ce que leurs capitaines portent un brassard arc-en-ciel pendant la coupe du monde ont rétropédalé face aux menaces de sanctions de la FIFA. Une censure pour ménager le régime qatari, qui révèle l’hypocrisie des fédérations européennes.

Gabriella Manouchki

22 novembre 2022

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La bataille autour des "brassards arc-en-ciel", que sept équipes européennes s’étaient engagées à porter pendant la coupe du monde de football, vient de se solder par un rétropédalage général face à la FIFA, soucieuse de ménager le régime qatari. La plupart des équipes ayant annoncé cette campagne "One Love" avaient déjà abdiqué sans faire de vague, après que le régime a rappelé qu’un tel geste serait passible d’amende. Seuls l’Allemagne, l’Angleterre et le Pays de Galles, ainsi que les Pays-Bas avaient alors réaffirmé leur engagement, s’annonçant "prêts à payer". Ce lundi, l’ensemble des sélections qui avaient initié la campagne ont finalement reculé dans un communiqué, consentant à la politique rétrograde de la FIFA.

Dans un pays où l’homosexualité est un crime passible de peine de mort pour les personnes musulmanes (et de 7 ans d’emprisonnement pour les autres), la FIFA consent donc à interdire tout acte de solidarité avec la communauté LGBT, que ce soit sous la forme d’un brassard sur le terrain, d’un drapeau ou même d’un t-shirt porté par un membre du public. La FIFA pousse le zèle jusqu’à exiger que la Belgique change les maillots de son équipe à la veille de son premier match parce que le mot "Love" est écrit dans le col. Dans les stades et au-delà, les couples homosexuels venus pour l’évènement sont invités à « faire preuve de discrétion » et pourront notamment être refusés dans les hôtels.

Pour masquer son opération de censure, la FIFA a proposé samedi dernier une campagne alternative qui se matérialisera par le port d’un brassard affichant des messages aussi consensuels que "Sauvez la planète”, “L’éducation pour tous” ou “Non aux discriminations”. Ces méthodes n’ont rien de surprenant de la part de la mafia internationale du foot, et le renoncement des fédérations nationales européennes en dit long sur leur prétendu « engagement », acceptable lorsqu’il permet du pink-washing à peu de frais, mais trop extrême quand il provoque les alliés qataris. Ainsi, en 2016, l’UEFA au comble du progressisme, avait finalement décidé de ne pas sanctionner le portier allemand pour le port d’un brassard aux couleurs du « rainbow flag » lors de l’Euro.

En particulier, la FFF s’est montrée particulièrement lâche sur cette question. Le 10 novembre dernier, Noël Le Graët, son président, expliquait déjà dans les colonnes de L’Équipe : « On va en discuter. Mais j’aime autant qu’[Hugo Lloris] ne le fasse pas. On va jouer dans un pays que l’on doit respecter ».

Quelques jours plus tard lors d’une conférence de presse , le capitaine des Bleus avait à son tour donné sa position, réactionnaire de A à Z : « Lorsqu’on est en France, lorsqu’on accueille des étrangers, on a souvent l’envie qu’ils se prêtent à nos règles, qu’ils respectent notre culture, et j’en ferai de même quand j’irai au Qatar, tout simplement. Après, je peux être d’accord ou non avec leurs idées, mais je dois montrer du respect par rapport à ça ». Une déclaration dans la continuité des propos qu’il avait tenu dans un clip de la FFF contre l’homophobie qui, selon Arrêt sur images n’avait jamais été publié, banalisant l’homophobie dans le milieu du football en l’assimilant à du "folklore". Le folklore qatari conduit à la peine de mort, mais le gardien des Bleus préfère "rester dans [son] cadre : celui de joueur et de compétiteur".

Plus largement, les fédérations européennes qui viennent d’abdiquer face à la FIFA au sujet du brassard n’ont jamais été les garantes d’une quelconque politique favorable aux LGBTI. Cette opération, si elles avaient eu l’audace de la mener, n’aurait été qu’une politique supplémentaire de pink-washing de leurs États respectifs. En cherchant à apparaître comme les ambassadrices des droits LGBTI au Qatar, les fédérations européennes mènent une politique qui n’a d’autre visée que celle de redorer l’image des États comme la France ou le Royaume-Uni. Difficile de faire pire que le Qatar à première vue, mais seulement à condition d’oublier que cette Coupe du monde y est organisée grâce aux largesses de la France, que le Qatar est armé jusqu’aux dents d’armes françaises et que les systèmes de surveillance ultra-sécuritaires mis en place pour la Coupe du monde sont fournis par Thalès. Le rétropédalage des fédérations face à la menace de la FIFA montre bien que, finalement, leurs intérêts économiques passeront toujours avant la défense de nos droits. Et pour cause : il y a des milliards de dollars en jeu. Et de ce point de vue, les impérialistes français ont déjà gagné la coupe au Qatar.


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