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Élections étudiantes

Bordeaux. Plus que jamais, la démocratie universitaire est un simulacre

Avec moins de 4% de participation, les élections étudiantes du Conseil de Collège Sciences Humaines et Sociales à l’Université de Bordeaux sont une nouvelle mascarade. La liste “Le Poing Levé” de Onzième Thèse enverra tout de même quelques élus dans le conseil.

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Le 4 février dernier, des élections étudiantes viennent de se dérouler à l’Université de Bordeaux, au collège de Sciences de l’Homme. Avec la liste « Le Poing Levé », l’association Onzième Thèse s’y est présentée, portant un projet de rupture avec la situation catastrophique de la jeunesse. Le Conseil des Collèges est une instance de direction intermédiaire, faisant principalement le lien entre le Conseil d’Administration et les directions de facultés, le personnel et les étudiants. Onzième Thèse s’est construit sur ce campus bordelais depuis plus d’un an maintenant, cherchant à regrouper une jeunesse qui veut relever la tête face une situation qui s’aggrave. Après l’occupation du site de la Victoire durant la réforme des retraites, nous avions déjà présenté une liste pour les élections des conseils centraux, avec une participation historiquement faible et des élections délocalisées, nous étions malgré tout déjà la première force sur le campus.

Des conditions d’élections anti-démocratiques

Le Collège de sciences humaines est divisé géographiquement en deux campus : l’un à Victoire, réunissant les facultés de Psychologie, Sociologie, Anthropologie et Sciences de l’éducation ; l’autre à Pessac abritant la faculté de STAPS.

Alors que les cours sur le campus de Victoire sont à distance depuis des mois, les élections se sont tenues en présentiel et sur une seule journée sur les deux campus. Une décision qui a maintenu voire approfondi une abstention déjà massive, dont le taux était déjà de 95,61 % aux précédentes élections. Pour celles-ci, il atteint 96,05 %…

Habituellement rien n’est fait pour visibiliser ces élections et ces instances. D’une part, aucune communication réelle n’est faite en amont, que ce soit sur le vote ou ses « enjeux » et si quelques informations sont disponibles sur le site de l’Université de Bordeaux, il faut vraiment vouloir les trouver dans des PDF à télécharger. D’autre part, aucun bilan des décisions n’est fait entre deux élections... une opacité qui participe au désintérêt des étudiants pour la question.

Les conditions de ces dernières élections ont poussé plus loin les problématiques. Alors que la plupart des étudiants ne vont plus sur le campus depuis plus de 3 mois avec le maintien du distanciel, on leur demandait de se déplacer pour une élection en présentiel. Évidemment, une grande partie des étudiants ne sont plus sur place puisqu’ils sont déjà retournés dans leurs familles pour vivre dans de meilleures conditions cette période difficile. Cela n’avait pas l’air de gêner grand monde du côté de la direction qui ne fait rien pour impliquer les étudiants dans les décisions qui les concernent directement, et n’en fait pas plus ne serait-ce les impliquer dans le processus « démocratique » des élections.

Tout cela révèle le fonctionnement anti-démocratique de l’Université ; anti-démocratisme qui se joue aussi dans les instances : dans le cas de ce conseil, ce sont seulement 9 places qui sont réservées aux étudiants sur 28 places au total… Et lorsque des décisions parfois progressives sont prises, le Conseil d’Administration peut les remettre en cause, sans que cela ne dérange personne et sans même besoin de se justifier car c’est ainsi que fonctionne l’Université... « c’est comme ça ».

Un exemple de ce fonctionnement anti-démocratique à l’Université de Bordeaux s’est illustré récemment sur la question des partiels de décembre qui, dans une logique de sélection sociale, ont été maintenus en présentiel. Les étudiants d’une promotion de psychologie avaient pourtant réalisé un sondage en amont qui montrait que l’écrasante majorité préférait le distanciel. Au délà du refus d’une volonté collective, on a même reproché aux étudiants d’avoir osé donner leur avis… Ce ne sont que les démonstrations du caractère profondément et structurellement anti-démocratique de l’Université, et que ces élections n’ont fait qu’exacerber.

Les résultats correspondent nécessairement à cette logique, avec moins de 200 votants sur un campus quasiment vide pour la Victoire. Côté Staps, le maintien de quelques activités en présentiel a permis une participation plus forte que d’habitude. S’il manque les résultats de l’antenne de Staps à Bayonne, les proportions changeront peu : notre liste « Le Poing Levé » obtient environ 30% des votants (au moins 2 sièges), la liste portée par l’association étudiante des Staps obtient un peu plus de 50% des voix (au moins 5 sièges), la liste portée par les associations de psychologie et sciences de l’éducation autour de 20% (au moins 1 siège), le dernier siège restant à calculer avec les résultats finaux.

Bien qu’ayant peu d’illusions envers ces instances, notre présence dans celles-ci doit être un point d’appui pour défendre une politique en rupture avec la gestion de la misère qui subsiste à l’université depuis des années. Gestion de la misère car il n’y a pas assez de moyens et la direction s’en contente, ce qui a laissé place à une gestion catastrophique de la crise sanitaire par l’université et le gouvernement alors même que des étudiants demandaient et réfléchissaient à un plan sanitaire à la hauteur.

Avoir des places dans ces instances sert aussi à porter plus de transparence sur ce qui s’y passe, puisque actuellement toute discussion y est faite dans l’opacité la plus totale (aucun compte-rendu n’est donné aux étudiants par exemple). Il est nécessaire de visibiliser les décisions prises pouvant aller à l’encontre des étudiants et du personnel de l’université. Mais il reste que beaucoup de décisions se prennent au niveau supérieur, dans le Conseil d’Administration, et ce quel que soit l’avis du Conseil des Collèges et ses représentants…

Un plan d’urgence pour la jeunesse, contre la sélection sociale sur fond de précarité

Aujourd’hui, c’est une nouvelle campagne qui est nécessaire, qui doit imposer un plan d’urgence pour la jeunesse dont la situation n’a que trop duré. Un ensemble de revendications qui concerne l’université, mais pas seulement, car on nous impose des conditions d’études de moins en moins tenable dans un contexte social et économique catastrophique : c’est toute une génération que l’on sacrifie. De la détresse psychologique à la précarité matérielle, nous voulons relever la tête et montrer que des alternatives sont possibles. Des alternatives tout d’abord pour satisfaire des besoins vitaux, se nourrir et se loger, et dans ce sens les quelques mesures du gouvernement sont largement insuffisantes de la même manière que les services sociaux de l’université tentent de boucher les trous comme ils peuvent, faute de moyens. Au contraire, ce dont nous avons réellement besoin c’est d’une revalorisation immédiate des aides pour les plus précaires afin d’étudier dans de bonnes conditions. Le rôle du CROUS est plus que minimal, alors qu’il manque déjà des milliers de logements et que les prix ne font qu’augmenter partout, où sont donc les plans de constructions supplémentaires ou encore de réquisition des logements vides ?

Nous revendiquons la mise en place d’un revenu étudiant à hauteur du SMIC qui permette pour tout un chacun de vivre décemment et donne les perspectives d’un avenir moins incertain que celui que l’on nous propose. Le gouvernement s’acharne à alimenter en centaines de milliards d’euros les grandes entreprises qui licencient continuellement, et pendant ce temps les emplois de nos parents sont tout de même massacrés, augmentant toujours plus la contraction du marché du travail et le chômage de masse qui retombe sur les jeunes et les générations futures. C’est bien aux côtés des travailleurs qui défendent leurs conditions de travail et leur emplois que, les jeunes, nous devons nous battre pour l’interdiction des licenciements dont on subit directement les conséquences.

Les universités sont censées rouvrir progressivement suivant la situation, mais entre manque de visibilité sur la situation et prise de décisions en petit comité, aucune solution ne sera bonne sans un plan d’investissement massif dans l’enseignement supérieur : pour embaucher de nouveaux enseignants, titulariser l’ensemble des contrats précaires, mais aussi embaucher des personnels pour prendre en charge et lever la pression des questions administratives qui débordent depuis trop longtemps. Un débordement des charges administratives qui résulte de toute l’organisation de l’Université dont personne ne sait comment sont prises les décisions, les étudiants n’étant que rarement consultés, sans jamais nous permettre de saisir pleinement ce qui nous concerne directement.

Si c’était le cas, la prétendue « continuité pédagogique » ne serait pas ce qu’elle est aujourd’hui car toutes les enquêtes sociales ont révélé que pour la majorité des étudiants elle constitue une pression délétère dans dans les temps de crise actuelle où la sélection sociale se poursuit en prenant a fortiori des formes plus insidieuses. Il y a bien évidemment la sélection entre la licence et le master que nous avons toujours dénoncé, mais aujourd’hui beaucoup n’atteindront même pas ce niveau d’études car le décrochage est massif et cela arrange aussi bien le gouvernement que les directions d’universités qui ne sont plus en capacité de gérer les masses étudiantes. Cette sélection passe par de nombreux mécanismes et procédés, la seule mesure pour y mettre fin est de garantir l’obtention de l’année pour toutes et tous, permettant aux personnes qui souhaitent poursuivre de le faire sans contrainte. Les modalités pouvant être un 10 minimum, amélioré par des formules qui ne reproduisent pas d’inégalités, sans obligation d’assiduité ou de contrôle continu. Pour ne prendre qu’un exemple, le maintien des obligations de stages dans la période est absurde, nous devons exiger qu’aucune pénalisation ne soit appliquée sous ce prétexte.

Si nous défendons tout cela, c’est d’abord pour une question de vie ou de mort puisque les suicides (et tentatives) dans la jeunesse expriment terriblement une rupture nécessaire avec la situation. Bien au contraire, nous pensons que l’université peut et doit être un lieu de débats et d’organisation permettant de réfléchir mais aussi d’agir activement pour une autre société et un autre avenir. Nous proposons déjà de nous organiser notamment pour l’ensemble de ces questions, dans des cercles au sein des promotions et plus largement pour porter ce programme comme peuvent le faire l’ensemble des collectifs « Le Poing Levé » en France.


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