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Grève à la RATP et à la SNCF

Bloquer les briseurs de grève, une méthode légitime du mouvement ouvrier

Depuis quelques jours, les actions de blocage des dépôts de bus, mais aussi d’interpellation des conducteurs non-grévistes dans le métro et dans le RER se multiplient. C’est une méthode qu’on n’avait pas vue depuis un certain temps et, face aux menaces de sanctions de la direction, beaucoup de salariés s’interrogent sur la légitimité et les risques de ce type d’action. Révolution Permanente fait le point sur la question.

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Les piquets de grève, une méthode classique du mouvement ouvrier

Dans l’histoire des mouvements de grève, le patronat a toujours cherché à limiter l’impact de la grève en faisant remplacer les grévistes par des travailleurs non-grévistes. Si le recours à des travailleurs extérieurs à l’entreprise est en général considéré comme une atteinte au droit de grève, le fait de former à la volée des cadres dont le travail n’est habituellement pas de tirer les trains pour remplacer les conducteurs grévistes, comme cela se fait aujourd’hui à la RATP ou à la SNCF, est considéré comme étant légal, alors qu’il constitue une pratique tout à fait semblable. Dès lors, chaque gréviste est en droit de se demander s’il ne serait pas légitime de les empêcher de le faire. De même lorsqu’il s’agit de travailleurs non-grévistes alors que la grève est votée de façon démocratique par l’immense majorité des agents.

La réalité, c’est que dans l’histoire du mouvement ouvrier, les grévistes ont toujours eu recours à des méthodes consistant à dissuader, voire à empêcher les « jaunes » de briser la grève. C’est l’essence même du piquet de grève. Ainsi, dans la grande grève des mineurs de 1948, les grévistes ont mis en place non seulement des piquets, mais de véritables barricades, et parfois même des tranchées avec des barbelés autour des puits. De même que plus récemment, en 2010, des blocages avec l’aide de soutiens extérieurs ont été montés autour des raffineries et des dépôts pétroliers, pour ne pas parler des occupations d’usine ou des séquestrations de patron qui ont pu également voir le jour à plusieurs reprises - alors que ce sont théoriquement des actes illégaux.

Une méthode illégale ?

Il est vrai que la constitution française dit que l’on n’a pas droit d’empêcher les travailleurs non-grévistes d’accéder à leur poste. Ce n’est pas pour rien que cette même Constitution n’a pas été écrite par des ouvriers ! Mais on sait bien que les lois sont faites pour être contestées et qu’en matière de lutte de classes, c’est souvent le rapport de forces qui finit par trancher les choses.

Il était par exemple interdit d’organiser des manifestations sans les déposer en amont en Préfecture, et obtenir un accord de celle-ci sur le parcours. Et pourtant, en quelques semaines, le mouvement des Gilets jaunes a balayé d’un revers de main cette obligation, et a imposé des manifestations dans des zones de la ville jusque-là interdites, comme c’était le cas des Champs Élysées à Paris. De même, au sein de la SNCF, le fait de s’asseoir sur l’obligation de déposer une déclaration individuelle d’intention de grève (DII) 48 heures en amont n’a pas fait objet de la moindre sanction, ni lors du droit de retrait qui a suivi l’accident en Champagne-Ardennes, ni lors de la grève « sauvage » du technicentre de Châtillon dans la banlieue Sud de Paris, tout simplement car la direction savait que le rapport de forces lui était défavorable.

La question d’éventuelles sanctions pour des actions de la grève se posera donc, comme toujours, en fonction du rapport de forces et des résultats de la grève elle-même.

S’appuyer sur des « forces auxiliaires »

Néanmoins, une façon d’éviter que les salariés de l’entreprise soient trop exposés à des sanctions de leur hiérarchie, c’est précisément de s’appuyer sur des secteurs extérieurs à l’entreprise et solidaires des grévistes pour ces actions de blocage. C’est ce qui a commencé à se faire dans certains dépôts de bus de la RATP et qu’il serait peut-être possible d’éteindre au métro, au RER et aux trains avec le soutien des enseignants grévistes, d’étudiants, des gilets jaunes, etc.

Les œufs et l’omelette ou l’esprit et la chair

Il ne s’agit pas d’une question nouvelle, si la question de piquets empêchant réellement les briseurs de grève de travailler ne s’est pas posée récemment, c’est en lien avec la forte domestication du mouvement syndical que les Gilets jaunes sont venus percuter avec force il y a plus d’un an. Le piquet est une arme au service de la grève et comme certains grévistes commencent à se le dire, « on ne fait pas d’omelette sans casser des œufs ».

Ou pour le dire avec les mots d’un vieux révolutionnaire : « On ne peut concevoir une grève sans propagande et sans agitation. On ne peut non plus la concevoir sans piquets de grève qui, quand ils le peuvent, agissent par la persuasion mais, quand ils y sont contraints, recourent à la force physique. La grève est en effet la forme la plus élémentaire de la lutte de classes, qui combine toujours, selon des proportions diverses, les procédés "idéologiques" et les procédés physiques. […] Celui qui pense qu’il faut renoncer à la lutte physique doit renoncer tout simplement à la lutte, car l’esprit ne vit pas sans la chair. » (Léon Trotsky, Où va la France ?)


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