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Mobilisation massive

Argentine. Le projet de loi pour la légalisation de l’avortement sera voté au Sénat le mercredi 8 août

Aujourd'hui, les sénateurs argentins se sont réunis en séance plénière des commissions sénatoriales pour donner leur avis sur le projet de loi visant à légaliser l'avortement, qui sera traité le 8 août. Dans l'intention de recueillir plus de votes, un avis modifiant certains aspects de la loi approuvé par la Chambre des députés le 14 juin a été présenté.

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Cependant, le projet de loi modifié n’a pas obtenu une majorité de signatures. Cela signifie que le mercredi 8 août, le projet qui sera traité est celui qui a été approuvé le 14 juin à la Chambre des représentants. Si le projet est approuvé en général, des modifications pourraient être apportées le même jour. En cas de rejet, le projet de loi perd son statut parlementaire pendant 2 ans. Si le projet de loi est adopté sans amendement, il devient loi. S’il est approuvé avec des modifications, il est de nouveau traité par la chambre des députés, qui a le pouvoir de voter sur le projet de loi ou d’insister sur l’original en obtenant la majorité des membres.

Certains des changements possibles sont la réduction du nombre de semaines de grossesse pour l’IVG (de 14 à 12), l’autorisation de l’objection de conscience sur la base de l’idéologie (des acteurs privés, mais non publics, peuvent s’y opposer au niveau institutionnel) et la suppression de la pénalité pour les professionnels qui entravent l’accès.

L’avortement en Argentine aujourd’hui

En Argentine, l’avortement est légal depuis 1921 dans les cas de viol ou de danger pour la vie ou la santé de la mère. Ce que propose ce projet de loi, c’est la décriminalisation totale de l’avortement jusqu’à la 14e semaine de grossesse.

Aujourd’hui, les avortements sont pratiqués clandestinement grâce aux « redes de socorrismo », réseaux de secourisme qui fournissent de l’information et du soutien aux femmes pendant les avortements. Cependant, les femmes argentines attendent toujours l’application de la loi sur l’éducation sexuelle intégrale, et il est bien connu qu’elles n’ont pas toutes accès aux réseaux de secourisme ou aux moyens pour acheter du misoprostol (qui est vendu dans les pharmacies sous le nom d’Oxaprost et coûte environ 3 000 pesos argentins, ce qui équivaut à plus de 90 euros), alors elles avortent d’une manière totalement précaire, généralement en brisant le sac amniotique avec un élément tranchant, ce qui peut générer des infections extrêmement dangereuses. C’est pourquoi aujourd’hui, en Argentine, l’avortement est un privilège de classe.

En ce qui concerne la lutte, après les résultats du 14 juin, les secteurs qui se disent « pro-vie », mais qui ne sont rien de plus qu’anti-droits, ont réagi en manifestant toute leur haine pour les femmes qui se battent pour le droit, ni plus ni moins, de décider. Plusieurs médecins et cliniques privées (qui pratiquent des avortements clandestins) ont déjà déclaré qu’ils ne feront pas d’avortement si la pratique est légalisée. Un anesthésiste qui a été plus tard séparé de son poste a affirmé dès que la loi a été approuvée par le Congrès que dans sa garde « les avortements se feront SANS ANESTHÉSIE ». De plus, les militantes qui décident de sortir tous les jours avec un foulard vert visible subissent des agressions verbales et physiques de la part de ce secteur minoritaire qui prétend défendre la vie, mais ne fait rien d’autre que recourir à la violence.

Cependant, dans les rues, le combat est gagné : les foulards verts envahissent toute l’Argentine, tout le monde parle du misoprostol et des méthodes d’avortement, et les « pañuelazos » sont massifs, atteignant jusqu’à un million de personnes.

Un cri mondial

Ce grand pas pour l’autonomie de notre corps ne se limite pas à l’Argentine. La « marea verde » en faveur de la dépénalisation de l’avortement s’est installée dans plusieurs pays d’Amérique latine, une région où l’avortement n’est totalement légal qu’en Uruguay, à Cuba, en Guyane et dans certaines parties du Mexique.

Un grand exemple est celui des mobilisations féministes au Chili, qui a émergé en avril 2018 et dont l’une des principales revendications est la légalisation de l’avortement. Au Chili, la dictature de Pinochet a criminalisé l’avortement sous toutes ses formes en 1989. Ce n’est qu’en 2017 qu’il a été dépénalisé pour trois raisons : danger de mort pour la mère, malformation du fœtus et viol, ce qui a permis de retirer le Chili de la liste des 18 pays au monde qui interdisent tout type d’avortement. Cependant, les femmes chiliennes soutiennent que #NoBastan3Causales (les trois cas ponctuels, ce n’est pas suffisant) et aujourd’hui elles se battent pour la dépénalisation totale de l’avortement.

Un autre cas important est celui du Brésil, où de nombreuses manifestations massives ont eu lieu ces derniers mois sous le slogan #AbortoLegal. Dans ce pays, l’avortement est considéré comme non punissable, d’après le Code pénal brésilien de 1940, si la vie de la personne enceinte est en danger, si le fœtus n’a pas de cerveau ou si la grossesse est le résultat d’un viol.

Pour leur part, au Costa Rica, au Venezuela, en Colombie, au Pérou, au Paraguay et en Équateur, nous avons vu dernièrement un élan important des mouvements qui luttent pour l’avortement légal. Ils ont même pris l’idée du foulard (hérité des Mères de la Place de mai, qui luttaient contre la dictature et la disparition forcée des personnes en Argentine pendant les années 70), mais en les teignant de leur propre histoire, changeant de couleurs et de slogans.

Pañuelazo international pour la légalisation de l’avortement en Argentine

Ce mercredi 8 août, il y aura des « pañuelazos » en soutien à la mobilisation et pour l’approbation définitive de la loi qui sera discutée au Sénat argentin. Ces manifestations de soutien auront lieu dans différents pays à travers le monde, tels que la Bolivie, le Costa Rica, le Chili, le Pérou, le Mexique, le Brésil, l’Allemagne, les Pays-Bas, le Royaume-Uni, la France, l’Autriche, l’Etat espagnol et Puerto Rico. À Paris, le rendez-vous est à 19 h devant le Sénat : https://paris.demosphere.eu/rv/63503

Crédits photos : M.A.F.I.A


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