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#AirbusGate

Airbus. Des masques pour sauver des vies, pas pour fabriquer des avions !

"On manque de masques" crient depuis des semaines les personnels de santé ! Alors que la crise n'a même pas atteint son pic, c'est le moment que choisit la direction d'Airbus pour engager une reprise du travail immédiate et brutale, pour ses salariés mais aussi en ordonnant à ses sous-traitants de rouvrir au plus vite. Deuxième scandale : Airbus a obtenu 20.000 masques. Si on ajoute les stocks et commandes de masques des nombreux sous-traitants, ce seraient plusieurs dizaines de milliers de masques qui seront ainsi consacrés à la reprise du travail dans ce secteur, plutôt qu'au personnel soignant en première ligne. Retour sur un double scandale...

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Suite aux annonces de fermetures des commerces non-essentiels, puis celle de Macron annonçant lundi le confinement, de nombreux travailleurs de secteurs non-essentiels se sont révoltés contre le fait de devoir aller travailler dans ces conditions, notamment dans la métallurgie.

Les travailleurs de l’aéronautique, moins mobilisés ces dernières années, ont joué un rôle notable, en faisant souvent fermer leur usine, sous la pression de droits de retrait collectifs, voire, plus rarement, de débrayages.

Loin d’une simple addition de droits de retrait individuels, ou d’une suite d’arrêts maladie, cette colère a souvent pris un aspect de lutte collective, dirigée contre le patron voulant poursuivre l’activité. Et ce, surtout dans les lieux de travail où il y avait des militants syndicaux combatifs pour les organiser. Le Medef le dit lui-même : il y a eu un « changement d’attitude extrêmement brutal des salariés ».

Mais après les premières frayeurs, le patronat de l’aéronautique, sous direction d’Airbus, repart à l’offensive. Organisant la reprise partielle de l’activité dans ses ateliers dès le lundi 23, Airbus écrit un mail à ses sous-traitants, les invitant (mais toute « invitation » d’Airbus est un ordre à exécuter) à reprendre l’activité au plus tôt.

(Voir traduction française au bas de l’article)

A l’heure où nous écrivons, cette reprise du travail est donc en train de s’initier à marche forcée. Selon les sous-traitants, certains ont repris dès ce lundi, d’autres dans les jours à venir, alors que certains n’ont même jamais stoppé l’activité (comme c’est le cas de Daher par exemple). Alors que les soignants nous supplient de rester chez nous, Guillaume Faury, PDG d’Airbus, ose expliquer que la fabrication d’avions dans les semaines à venir est une urgence essentielle. Mieux, il ose se présenter, sans rire, comme le « garant de la sécurité de ses salariés ».

Dans le patronat de la sous-traitance aéronautique, il n’en fallait pas moins pour présenter à leurs salariés des « plans de redémarrage de l’activité », expliquant qu’il ne faut pas se fâcher avec Airbus, sous peine qu’il ne s’adresse à d’autres concurrents.

« Il faut montrer notre bonne volonté au client » explique un patron de ce secteur. Par contre, la « bonne volonté » vis-à-vis des salariés attendra...

Dans plusieurs entreprises, le moyen de pression des patrons consiste à expliquer qu’ils ne sont pas certains d’obtenir l’acceptation du chômage partiel, et tentent donc de faire croire à leurs salariés qu’ils ne seraient tous simplement pas payés s’ils ne reprennent pas !

Bien que les « plans de redémarrage » proposés soient « progressifs » (d’abord, une poignée de salariés, parfois au « volontariat », puis une deuxième vague à une date non-définie...), la démonstration est faite aux salariés que les considérations économiques de ces patrons passent avant leur santé.
A quelle vitesse progressera cette reprise de l’activité ? Cela dépendra de la combativité des travailleurs et de la peur des patrons à faire un pas de plus.

Le scandale des masques. On ne veut pas juste applaudir à 20h, on veut donner nos masques aux soignants

En plus de risquer la vie des ouvriers, un deuxième scandale s’ajoute. Pour sa reprise, le secteur aéronautique va utiliser à partir de cette semaine plusieurs dizaines de milliers de masques. Alors même que le manque de masques pour les soignants, des hospitaliers aux ambulanciers en passant par la médecine de ville, est devenue une question épineuse pour le gouvernement et une question de vie ou de mort pour celles et ceux qui risquent leur vie pour soigner la population. C’est ce qui rend plus incroyable encore la livraison récente de 20.000 masques à Airbus. Si l’on ajoute les stocks, et les commandes passées directement par les sous-traitants, le chiffre monte énormément. Un sous-traitant moyen, comme les Ateliers de la Haute-Garonne (environ 250 salariés), conserve un stock de 1000 masques (qui était jusqu’ici gardé sous clefs !) et va recevoir 10.000 masques supplémentaires. Quand on connaît le grand nombre de sous-traitants, on peut estimer que plusieurs dizaines, voire plusieurs centaines de milliers de masques seront utilisés dans les semaines à venir pour la fabrication d’avions. Avions qui, même s’ils étaient livrés aux compagnies aériennes, ne volent pas en ce moment, ou pire, volent à vide !

Ces masques doivent aller en priorité au personnel de santé, et certains ouvriers commencent déjà à réclamer cela de leur patron.

Face à l’offensive coordonnée des patrons de l’aéronautique et du gouvernement, il faudra une réponse coordonnée des travailleurs de ce secteur.
Une réponse qui non-seulement s’oppose à la réouverture dans l’urgence de secteurs non-essentiels face à la crise sanitaire, mais qui exige y compris ses propres solutions à la crise. Dans l’urgence, dans la « guerre » en cours, la première des revendications est la suivante : « Tant que chaque soignant n’a pas de masques, on ne travaillera pas ! »


(Traduction du mail d’Airbus)

Chers fournisseurs,

Afin de s’assurer que la force de production d’Airbus opère dans des conditions de sécurité acceptables au regard de l’impact du Covid-19, Airbus a décidé de mener une intense vérification sanitaire et sécuritaire dans les usines et les lieux de travail des pays où la pandémie est en stade 3 (France et Espagne) qui sera mise en place par les autorités locales. En conséquence, la production en France et en Espagne a été momentanément suspendue du 17 mars au 20 mars inclus. La production au Royaume-Uni et en Allemagne continue aussi normalement que possible tout en s’adaptant aux circonstances actuelles. 

Airbus recommencera la production lundi de la semaine prochaine en France et en Espagne, initialement à une vitesse réduite, dans des conditions sanitaires et sécuritaires strictes pour notre personnel et nos sous-traitants. Ces nouvelles mesures de travail incluent, mais ne s’y limitent pas, des systèmes de rotation spécifiques, la réorganisation des postes de travail pour limiter les contacts et des équipements spécifiques pour le personnel. Toutes les mesures possibles et pertinentes sont étudiées activement. 

En principe, Airbus doit demander à ses fournisseurs d’assurer la continuité des livraisons et des opérations conformément aux contrats et aux bons de commande associés. En pratique, étant donné le contexte actuel exceptionnel, nous demandons que vous vous référiez à vos équipes Airbus respectives dans les prochaines 24 heures (votre service d’approvisionnement habituel/interface de chaîne d’approvisionnement) afin de nous fournir un plan de continuité d’activité et de nous dire si vous anticipez des risques de perturbation dans votre approvisionnement à Airbus à la suite de la mise en place des mesures sanitaires et/ou des recommandations et régulations des autorités locales.

Airbus insiste sur la visibilité sur la capacité projetée pour au moins les 3 prochaines semaines, en termes de stock en cours, du pourcentage de présence d’employés à compter de ce jour, et les possibles problèmes opérationnels demandant un support renforcé et une collaboration de et avec Airbus. Si la situation évolue, vous êtes priés de nous en informer rapidement. 

Les plateformes logistiques allemandes et anglaises et les envois directs vers les usines et lignes d’assemblage final de ces pays fonctionnent normalement. Nos prestataires logistiques appliquent déjà les nouvelles règles sanitaires. 

Aussi, veuillez noter que nos opérations à Tjanjin/Chine, Mobile/USA, et Mirabel/Canada fonctionnent dans des conditions normales jusque-là. De plus, la livraison de pièces détachées doit être assurée.

Airbus s’engage sans compromis dans la santé et la sécurité (de ses agents) et vous conseille d’appliquer les même niveaux de standard et d’exigence. 

Ces temps très difficiles nous amènent à nous confronter à des conditions exceptionnelles pour notre peuple/notre personnel et nos compagnies. Il est d’importance cruciale pour le futur de nos compagnies respectives et pour l’industrie aéronautique qu’Airbus et ses fournisseurs demeurent sur la même longueur d’onde et collaborent. A cet égard, nous exhortons nos fournisseurs à ne pas prendre de décision unilatérale qui pourrait mettre en danger tout l’eco-système sans avoir consulté Airbus au préalable. 

Merci pour votre soutien, nous demeurons à votre disposition pour toute information.


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Gaëtan Gracia, CGT Ateliers de Haute-Garonne

Militant à la CGT Ateliers Haute-Garonne
Twitter : @GaetanGracia

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