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Afrique du Sud : brutale agression raciste

Ces derniers jours, en Afrique du Sud, a eu lieu une agression raciste d’une extrême violence perpétrée par deux fermiers blancs à l’encontre d’un jeune Noir, qui, selon ces derniers, serait « entré par effraction sur leurs terres ». Une vague d’indignation s’en est suivie dans le pays, provoquant une forte mobilisation et ravivant de manière importante les tensions raciales inhérentes à la société sud-africaine post-apartheid. Les deux fermiers, qui ont tenté d’enterrer vivant le jeune homme noir tout en menaçant de le brûler, ont été appelés mercredi devant le tribunal de Middelburg à Prétoria, afin de répondre aux faits d’« agression et de tentative de coups et blessures ». À l’issue de cette première audience, le procès a été reporté au 25 janvier prochain. Cette agression raciste, qui est loin d’être un cas isolé, a eu pour conséquences de rouvrir le débat sur le racisme de la société sud-africaine. Lili B.

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C’est une vidéo de l’agression, diffusée sur les réseaux sociaux, qui a suscité de vives émotions et a permis de rendre publique cette agression raciste, aboutissant de ce fait à la mise en examen des auteurs. Si cette vidéo a suscité tant d’émoi et d’indignation, c’est parce qu’elle renvoie de manière très brutale à la réalité et à la puissance du racisme dans la société sud-africaine post-apartheid, et à ses expressions les plus violentes et déshumanisantes. Les images qu’on y voit sont en effet insoutenables : le jeune homme noir, Victor Mlotshwa, est allongé dans un cercueil, posé à même le sol, tandis que l’un de ses agresseurs tente de refermer le cercueil. On entend ensuite Victor Mlotshwa gémir, alors qu’il essaye coûte que coûte d’empêcher son agresseur de refermer le cercueil. Ce supplice est accompagné d’insultes et de menaces de mort : « Viens là, on va jeter du pétrole. Amène-moi ce serpent aussi (…). Allez, je ferme ! ».

Les deux auteurs de l’agression ont ensuite posté cette vidéo sur internet. Cette attitude, qui n’est rien d’autre que l’expression du sentiment de toute-puissance que ressentent ces hommes blancs, témoigne de la banalisation et de l’impunité des actes racistes au sein de la société sud-africaine.

Ces violences racistes font partie intégrante de la société sud-africaine, ce que le porte-parole du parti de gauche des Combattants pour la liberté économique (EFF), Mbuyiseni Ndlozi, n’a pas manqué de rappeler en mentionnant le fait que cette agression n’est « pas un cas isolé », au sein de ce « pays qui a connu un passé très douloureux et qui semble être encore présent », dans lequel « les Noirs continuent d’être traités comme des animaux ».

Derrière le mythe de la « nation arc-en-ciel » se cache en effet une société profondément inégalitaire, dans laquelle les Blancs conservent un pouvoir disproportionné sur l’économie et d’autres secteurs importants comme l’éducation supérieure. Malgré une petite élite, la majorité des Noirs restent écartés du pouvoir économique et se retrouvent davantage exploités et précarisés. Aussi, 28% des Noirs sont au chômage, contre 7% des Blancs.

Ces inégalités économiques et raciales ont provoqué, et provoquent toujours, des mobilisations d’ampleur chez les populations noires. Suite à cette attaque raciste, qui a eu pour conséquence de relancer les débats sur les inégalités raciales, nombre d’entre eux se sont mobilisées. Ces mobilisations ont notamment été impulsées et encadrées par certaines organisations politiques noires qui se sont saisies de l’affaire. Ainsi le Parti des combattants pour la liberté économique, du populiste Julius Malema, ancien dirigeant de la jeunesse de l’ANC d’où il a été exclu en 2012, a organisé une marche mercredi devant le tribunal. Lors de cette marche, la colère s’est faite ressentir au sein des manifestants qui, pour certains, réclamaient que « les racistes pourrissent en prison », tandis que d’autres réclamaient leur mort.

Dans un contexte où les tensions raciales sont déjà vives, il est fort probable que cette nouvelle attaque et son extrême violence les renforcent. Comme l’illustrent les déclarations tenues par certains politiciens noirs, comme Colin Sedibe, responsable régional de l’EFF : « La minorité blanche se sent en terrain conquis (…) S’ils ne changent pas, cela peut se terminer en chaos, une confrontation entre Noirs et Blancs ».

On peut cependant espérer que cette colère sociale, qui a éclaté suite à cette énième agression raciste, trouve un écho au sein de la classe ouvrière et les couches populaires et prenne une ampleur nationale. Dans un contexte national de lutte permanente, où l’Afrique du Sud possède le plus fort taux de conflictualité sociale au monde, et où la question raciale est un débat central qui politise et mobilise beaucoup, ceci est plus qu’envisageable. D’autant plus lorsque l’on prend en compte la nouvelle force sociale que représente la génération militante qui a émergé l’an dernier sur les campus, et qui à travers le mouvement #RhodesMustFall, a repolitisé de manière plus radicale la question raciale, trouvant un écho important au sein de la population.

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