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En décembre, il va pleuvoir des licenciements !

À partir d’aujourd’hui, les licenciements économiques de la loi travail peuvent s’appliquer

C’était une des mesures les plus contestées de la « loi travail ». L’article 67, facilitant les licenciements économiques, entre en vigueur à partir de ce jeudi 1er décembre. À quoi les salariés doivent-ils s’attendre ? Camille Pons

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L’article concernant les licenciements économiques a été un des points les plus clivants de la loi, comme l’inversion de la hiérarchie des normes ou le plafond des indemnités prud’homales. La loi, dans son ensemble, a été définitivement adoptée le 8 août (en plein été et par triple 49.3, s’il vous plaît), et les décrets d’application commencent à sortir les uns après les autres.

À partir d’aujourd’hui, les règles concernant les motifs de licenciements économiques changent.
Tout d’abord, le nouvel article, remplaçant l’ancien, ajoute deux nouveaux motifs de licenciements économiques, autrefois laissés à l’arbitrage du juge : la « réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de son activité », et la cessation d’activité. Tous deux existant toutefois déjà auparavant par la jurisprudence de la Cour de Cassation.
Tout en rappelant les deux autres motifs de licenciements économiques, la « mutation technologique » et les « difficultés économiques », l’article s’attache, et c’est là le nœud du problème, à définir ce que voudra dire à présent « difficultés économiques », qu’un juge le veuille ou non.
Elles peuvent être considérées comme telles si elles sont « caractérisées soit par l’évolution significative d’au moins un indicateur économique tel qu’une baisse des commandes ou du chiffre d’affaires, des pertes d’exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l’excédent brut d’exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés ».
Autrement dit, toute entreprise peut facilement, si elle veut appliquer un plan de licenciements, se déclarer en difficulté.
« La loi va naturellement faciliter les licenciements puisqu’elle fixe des cas dans lesquels ils seront automatiquement considérés comme justifiés, au regard d’indicateurs comptables sur lesquels de nombreux employeurs peuvent aisément jouer », s’inquiète l’avocate Judith Krivine.
Le critère d’une baisse du chiffre d’affaires par exemple, paraît absurde (et n’était d’ailleurs jamais considéré par la jurisprudence comme un motif suffisant) : « Ce critère ne veut rien dire en soi, une entreprise d’un secteur très profitable comme l’industrie pharmaceutique peut présenter un chiffre d’affaires inférieur à celui de l’année précédente mais demeurer très riche », explique un autre avocat, Étienne Colin.

Mais ça n’est pas tout ! La loi hiérarchisera aussi les périodes de baisse d’un de ces critères en fonction de la taille des entreprises :
« a) Un trimestre pour une entreprise de moins de onze salariés ;
b) Deux trimestres consécutifs pour une entreprise d’au moins onze salariés et de moins de cinquante salariés ;
c) Trois trimestres consécutifs pour une entreprise d’au moins cinquante salariés et de moins de trois cents salariés ;
d) Quatre trimestres consécutifs pour une entreprise de trois cents salariés et plus »
Traduction : à moins de travailler dans une entreprise en constante croissance de commandes, de chiffre d’affaires, etc. (c’est une image, cette entreprise n’existe pas !), il ne faut pas trop croire à la sécurité de son emploi, CDI ou pas. Même en ne commettant aucune faute, en ne permettant pas au patron de licencier pour « motif personnel » (ce qui est l’autre motif de licenciement, que les patrons savent très bien inventer parfois), tout salarié pourra être jeté au chômage sous prétexte « économique ».
Le texte de départ prévoyait même que la notion de difficultés ne s’applique que dans un périmètre national, permettant aisément qu’une multinationale organise ses propres difficultés sur un territoire pour mettre en place un PSE et délocaliser. Le gouvernement avait reculé sur ce point, et bien que le Sénat avait voulu réintégrer l’amendement, le texte final ne le comporte pas. Mais en réalité, cela ne change pas grand-chose.
Dès ce mois de décembre, on peut penser que des entreprises qui le prévoyaient mais qui attendaient ce décret annoncent des plans de licenciements en nombre ! Comme on commence à en voir certaines vouloir renégocier des accords d’entreprise.
A Airbus, Latécoère, Aubert&Duval, à La Poste, la SNCF, dans les hôpitaux, nous subissons déjà les suppressions d’emplois par milliers. Face à l’offensive du patronat, qui se prépare à de plus grandes attaques dès 2017, nous devons préparer notre riposte, notre programme, notre stratégie.


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