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Grève dans la santé

À Bordeaux, le CHU dépense près de 20 000€ pour casser une grève et ne pas répondre aux revendications

À Bordeaux, le personnel du service de réanimation pédiatrique du CHU de Pellegrin est en grève depuis plus de deux mois. Une mobilisation que la direction du CHU est déterminée à casser, quitte à dépenser plusieurs dizaines de milliers d’euros pour que les grévistes se taisent.

2 mars 2023

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Crédit photo : AFP

La direction du CHU ne lâche pas sur les revendications

Depuis le 26 décembre 2022, l’équipe du service de réanimation pédiatrique du CHU de Pellegrin est en grève. Infirmières, aides-soignantes, ASH se battent pour l’amélioration de leurs conditions de travail, la revalorisation des heures de nuit ainsi que la création de nouveaux postes sur le service. Des revendications que la direction du service refuse d’entendre quand elle ne se satisfait pas d’octroyer quelques miettes avec un poste d’auxiliaire de puériculture de nuit et un poste d’aide à l’infirmier. Deux concessions loin de satisfaire le personnel en grève.

Pour cause, alors que la direction a refusé la revalorisation des heures de nuits, elle a également balayé celle de la création d’un poste à l’accueil. Un poste pourtant central pour le service comme nous l’explique Stéphanie, infirmière et gréviste : « ce poste est essentiel pour le patient et sa famille, pour accompagner les parents en cas de décès par exemple ». La création de ce poste, ajoute-t-elle, est également primordiale afin d’assurer la sécurité du personnel et des patients : « parfois on retrouve des gens qui n’ont rien à faire dans le service car des patients ont ouvert la porte, mais on ne peut pas tout faire ce n’est pas à nous de gérer les entrées en plus des soins  ».

Casser la grève quitte à dépenser des dizaines de milliers d’euros

Face aux revendications, la direction opte pour la stratégie de la division et de l’épuisement des grévistes. Comme nous l’explique Stéphanie, « la direction a réussi à nous fractionner dans notre grève en acceptant les revendications des uns mais pas des autres, ce qui conduit à une démobilisation de certains grévistes ».

Dans le même temps, la direction mobilise une stratégie devenue monnaie courante dans les services publics de santé : les assignations. En effet, en maintenant les services en sous-effectif constant, les directions ont recours à des réquisitions de l’ensemble du personnel dès qu’une grève est déclenchée. C’est également le cas à l’Ehpad des Jardins de l’Alouette où tous.te.s les soigant.e.s sont assigné.e.s alors qu’elles se battent également pour de meilleures conditions de travail et un accueil digne des patients.

Or, cette stratégie est coûteuse pour le CHU, comme nous l’explique l’infirmière du service des urgences, en deux mois de grève, l’hôpital a dépensé entre 20 000 et 30 000 euros en frais d’huissiers pour faire assigner les grévistes. Concrètement, cela est l’équivalent du salaire d’un poste pour une année. Une preuve, s’il en fallait une, que face aux revendications des personnels de santé, l’argument budgétaire ne tient pas, et que le mépris est de règle.

Face aux pressions exercées par la direction, et épuisé.e.s par des négociations qui n’aboutissent pas, les grévistes sont à bout et certain.e.s se découragent. Stéphanie nous explique : « Les soignants ne croient plus à la grève mais si on lâche maintenant nous n’obtiendrons jamais ce poste, la direction attend qu’on s’essouffle ».

Le mouvement interprofessionnel contre la réforme des retraites doit inclure les revendications portées par le secteur de la santé depuis des années

Conscient.e.s des manœuvres de la direction, et après deux mois de grève, ce sont encore 55% du personnel qui se disent prêt.e.s à poursuivre la bataille. Devant une telle détermination, il s’agit de se solidariser des grévistes de la réanimation pédiatrique de Pellegrin.

En effet, dans la santé, les mobilisations ont afflué ces dernières années et mois, alors même que le secteur est épuisé par les épidémies successives et les conséquences qu’engendre la casse des services publics sur leurs conditions de travail. Du mouvement massif dans les services d’urgences en 2019, des grèves contre la mascarade du Ségur, jusqu’aux multiples mobilisations dans les différents services, la première ligne a démontré l’urgence de changement structurels, ainsi que sa volonté de se battre. Aujourd’hui, se sont ces mêmes travailleur.euse.s que vise le gouvernement Macron avec une réforme des retraites qui nous fera tous travailler deux ans de plus.

Nous savons ce dont a réellement besoin le personnel de santé : ce sont des moyens, des embauches et une augmentation des salaires. Alors que la bataille contre la réforme des retraites a mis des millions de personnes en grève et dans la rue ces dernières semaines, plus que jamais l’occasion de conquérir ces revendications et faire reculer Macron se présente à nous. Si la question des salaires est ancrée à la base dans le mouvement contre la réforme des retraites, les directions syndicales doivent étendre les revendications et donner les moyens à la construction d’un mouvement d’ensemble, contre la réforme des retraites, pour les salaires et les services publics. Il en va de l’intérêt de l’ensemble de la classe ouvrière qui, en plus de l’augmentation du coût de la vie, subit la destruction du service public et sa privatisation. Enfin, alors que les assignations sont un obstacle important à la mobilisation dans la santé, les secteurs qui aujourd’hui cherchent à construire la grève reconductible et à véritablement bloquer l’économie, doivent se tourner vers le personnel de santé et se solidariser avec leurs revendications. Pour cela, l’organisation à la base du mouvement peut permettre à ce genre de liens d’émerger.


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