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De George Floyd à Michel Zecler

Michel tabassé par la police : brebis galeuses ou violences policières structurelles ?

Les images du passage à tabac de Michel Zecler par la police ont choqué l'opinion publique, en pleine offensive sécuritaire du gouvernement avec la loi Sécurité Globale. Alors de quoi les violences policières sont-elles l'expression ? De simples "brebis galeuses" isolées ou d'une institution profondément violente et raciste ?

Mahdi Adi

28 novembre 2020

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Captures de la vidéo publiée par Loopsider

La révélation des images de violences policières contre Michel Zecler, producteur de musique à Paris, et neuf artistes présents dans son studio au moment des faits ont provoqué une vague d’indignation. En pleine offensive sécuritaire du gouvernement, avec la loi Sécurité Globale qui prévoit de renforcer l’impunité policière en restreignant la diffusion d’images de policiers en intervention, ces révélations ouvrent une brèche dans l’opinion publique pour interroger le rôle de la police.

Des prises de position d’artistes et de footballeurs aux réactions sur la toile suite à la diffusion de ces images choquantes, de plusieurs policiers tabassant un homme noir en proférant des insultes racistes, l’affaire a obligé le gouvernement à réagir. Christophe Castaner ou encore Emmanuel Macron ont condamné les actes des agents de police, tandis que Gérald Darmanin a annoncé la suspension des agents en question.

Mais à l’instar des images de la mort de George Floyd aux États-Unis et de la mobilisation massive contre les violences policières et le racisme d’État qui s’en est suivie, la question qui se pose aujourd’hui est la suivante : ces policiers sont ils des « brebis galeuses », ou bien les violences et le racisme sont-elles la norme dans la police ? En somme, peut-on réformer la police ?

Un corps de police profondément raciste et réactionnaire

Dans l’émission Les Grandes Gueules diffusée ce matin sur RMC, Barbara Lefebvre, membre de la Ligue Contre le Racisme et l’Antisémitisme, décalait : « Cette affaire a un intérêt énorme (…) parce que c’est quelqu’un [Michel] qui respecte la police et qui respecte la justice. Il l’a dit : ces trois individus pour lui ce ne sont pas des policiers ». Pourtant ceux que l’on voit tabasser Michel Zecler sur les images de vidéo-surveillance révélées par Loopsider sont bien des policiers de la Brigade Territoriale de Contact (BTC) du 17ème arrondissement de Paris.

Le collectif Désarmons-les explique dans un article : « Les BTC, anciennes BST, sont un dispositif néocolonial expérimenté dans les banlieues depuis quelques années. Dans la pure tradition de "l’anticriminalité", concept inventé par Pierre Bolotte, premier préfet de Seine-Saint-Denis, fossoyeur des grévistes guadeloupéens en mai 67 (plus de 80 morts) et inventeur de la première BAC en 1971 (toujours à Saint-Denis), l’objectif de ces unités spéciales est de "taper du délinquant", de faire du "saute-dessus", notamment sur la base de critères racistes (délit de faciès notamment). » De plus, ces brigades avaient été incorporées aux Détachements d’Action Rapide (DAR) créés pour réprimer les Gilets Jaunes, blessés et mutilés par dizaines, fin 2018 à coup de LBD et de grenades de désencerclement.

LES BTC ET LE SYNDROME MALIK OUSSEKINE : DES BRIGADES POUR CHASSER LES "MÉTÈQUES ET LES GAUCHISTES"

L'équipe de petites...

Publiée par Désarmons-les sur Jeudi 26 novembre 2020

"Sans les vidéos, il se serait passé quoi ?"

Hier soir le champion du Monde de football Benjamin Mendy publiait sur son compte twitter le message suivant : « Sans les vidéos, il se serait passé quoi pour Michel ? On aurait préféré croire la version des policiers sous serment ? #commedhab » En effet, les violences policières commises à l’encontre de Michel ne sont pas exceptionnelles. On pourrait à ce titre citer le cas de Théo Luhaka, celui d’Adama Traoré, de Cédric Chouviat, et de tant d’autres. La différence réside surtout dans le fait que dans ce cas précis les vidéos rendent la violences et les insultes racistes impossibles à nier.

Une réalité sociale que le gouvernement et les grands médias cherchent à invisibiliser. Ainsi Barbara Lefebvre affirmait également sur le plateau des Grandes Gueules ce vendredi : « cette affaire aura un retentissement beaucoup plus profond que celui qu’ont essayé de faire à la suite de George Floyd la petite secte autour d’Assa Traoré (sic), parce que c’est des gens qui ont eu un discours identitaire, de rejet, et de haine ». Et Olivier Truchot d’ajouter : « Michel n’instrumentalise pas son affaire pour des raisons politiques et idéologiques. Il demande simplement justice ».

En s’en prenant au Comité Adama qui dénonce le caractère structurel des violences policières et du racisme d’État, cette membre de la LICRA et le chroniquer des Grandes Gueules tentent de pointer du doigt seulement les policiers qui ont été pris en flagrant délit par les vidéos cette fois, tout en exonérant l’ensemble du corps policier et en légitimant son rôle répressif. A ce titre on comprend d’ailleurs mieux la logique qui pousse aujourd’hui le gouvernement à restreindre la diffusion des images de policiers en intervention avec la loi Sécurité Globale, avec l’objectif d’empêcher la diffusion d’images de violences policières dans un contexte de crise profonde qui augure de futures explosions sociales sur le terrain de la lutte des classes. C’est face à cela que la Macronie tente de se préparer en renforçant son arsenal répressif et en essayant de relégitimer le corps policier.

Le rôle de la police est de maintenir l’ordre inégalitaire, injuste et raciste qui profite aux classes dominantes

En réalité la police n’a pas d’autre rôle que de maintenir un ordre profondément inégalitaire, injuste, et raciste au profit des classes dominantes. Par ailleurs les brigades comme la BTC ou la BAC sont employées pour réprimer dans les quartiers populaires, en important les méthodes racistes et coloniales produites par l’État français. Aucune réforme de l’institution policière n’est possible, et encore moins dans un contexte de tension sociale exacerbée où le maintien de l’ordre par la matraque apparaît comme un outil central pour assurer la domination du pouvoir.

C’est la raison pour laquelle toute forme de pseudo-réforme ou de condamnation individuelle des policiers ne peut mener à faire cesser les violences policières. Une question qui renvoie à la mobilisation Black Lives Matter qui a suivi la mort de George Floyd aux Etats-Unis. Là-bas, le mot d’ordre de démantèlement de la police a été largement adopté, et parfois appliqué dans certaines villes aux corps policiers les plus réactionnaires. Toutefois ce démantèlement a donné lieu à son remplacement par une autre police, répondant à une autre hiérarchie, mais toujours au service du même ordre inégalitaire, et conduit à la reproduction des crimes policiers racistes. Cela montre cependant l’aspect structurel des violences policières et du racisme d’Etat, avec lesquels il ne sera possible d’en finir qu’en renversant l’ordre capitaliste. C’est en tout cas ce débat qu’il s’agit aujourd’hui d’ouvrir.


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