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« Collabos », « dégagez » : quand les insultes contre l’UNEF révèle le contenu réel de l’ « unité nationale »

« Collabos », « dégagez » : ce dimanche Place de la République, où se tenait un rassemblement hommage à Samuel Paty, la représentante de l’UNEF, Mélanie Luce, a été insultée et sifflée pendant son intervention. Une attaque qui a duré pendant plusieurs minutes et qui révèle à sa façon la nature réactionnaire de l’ « unité nationale » promue par le gouvernement et acceptée par la gauche institutionnelle et les directions syndicales.

Esther Tolosa

20 octobre 2020

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Crédits photos : AFP

Suite à l’assassinat ignoble de Samuel Paty vendredi soir dernier, plusieurs milliers de personnes étaient réunies ce dimanche place de la République à Paris. Appelé par SOS Racisme, la FSU, le SGEN-CFDT, la CGT Educ’ Action, l’évènement a rassemblé des personnalités du gouvernement, de la droite et de la gauche institutionnelle, s’inscrivant de facto dans le cadre de « l’union nationale » voulue par Macron.

Au moment des prises de paroles des organisateurs, alors que des discours se succédaient évoquant la mémoire de Samuel Paty ou la liberté d’expression dans un lourd silence, rarement interrompu par quelques applaudissements, l’intervention de la présidente de l’UNEF, Mélanie Luce, a été accueillie par des cris, des sifflements et des insultes. « Collabos », « dégagez » et « traitres à la laïcité » a-t-on pu entendre crier certains manifestants, malgré les tentatives d’un organisateur de ramener le calme. Des insultes qui se sont accompagnées de sifflements au moment où Mélanie Luce abordait la liberté de croire, au point que la Présidente de l’UNEF a eu du mal à terminer son intervention.

Ces attaques s’inscrivent dans les nombreuses polémiques islamophobes auxquelles fait face l’UNEF depuis plusieurs années. Le syndicat étudiant se voit notamment reprocher, par les tenants d’une « laïcité » dure, dirigée contre les musulmans, d’avoir renoncé à la laïcité pour le simple fait d’avoir une vice-présidente voilée, mais aussi d’avoir appelé à la marche contre l’islamophobie. Encore récemment, sa vice-présidente Maryam Pougetoux s’est vue attaquer violemment, notamment par des députés de la majorité, pour avoir porté le voile dans le cadre d’une commission d’enquête de l’Assemblée Nationale. Dans une vidéo de réponse à ces insultes, la présidente de l’UNEF rappelle la violence des attaques et le sens du mot collabo : « Les collabos ce sont les personnes qui ont collaboré avec le régime nazi pendant la seconde guerre mondiale ». Des mots lourds de sens, instrumentalisés pour attaquer l’UNEF en associant l’Islam au nazisme, et qui tiennent à une conception dévoyée de la laïcité qui voudrait faire de celle-ci une arme contre les musulmans.

De fait, ces insultes contre l’UNEF qui ont eu lieu lors du rassemblement de dimanche, même si elles ne concernaient qu’une partie de la foule, révèlent assez bien le contenu réactionnaire de l’ « unité nationale ». Orchestrée par le gouvernement, et suivie par l’ensemble de la gauche institutionnelle jusqu’à LFI, celle-ci vise précisément à associer et mettre sur le même plan les très nombreux enseignants, venus dimanche rendre hommage à leurs collègues, et tous ceux qui profitent déjà de l’attentat pour avancer leurs projets islamophobes, à commencer par le gouvernement mais aussi la vieille gauche vallsiste, la droite et l’extrême-droite.

Dans un contexte d’offensive sécuritaire et réactionnaire du gouvernement, qui entend profiter de l’émoi pour attaquer les musulmans et renforcer son projet islamophobe de loi contre le « séparatisme », renommée loi sur le « renforcement de la laïcité, ces insultes essuyées par l’UNEF rappellent que tous ceux qui voulaient simplement rendre hommage à Samuel Paty n’avaient rien à faire aux côtés de ceux qui ne visent qu’à l’instrumentaliser. Le discours sur l’unité nationale est un enfumage permettant au gouvernement de renforcer et légitimer son arsenal répressif, et laisse la porte ouverte aux discours belliqueux à l’encontre des musulmans et à tous types d’amalgames, comme qui fait d’une syndicaliste étudiante voilée une ennemie de la laïcité. Plus que jamais, aucune concession ne doit être faite à ce gouvernement et à la classe politique qui ne cessent d’alimenter un climat sécuritaire et d’austérité accroissant de fait les tensions qui traversent la société.


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